Badiou ou l’impudence d’un criminel de séminaire
Un nominalisme para-religieux
Dans toute religion d’annonciation, à l’instar du christianisme, l’important n’est pas tant de montrer et de fournir des preuves, que de proclamer et de rabâcher que l’événement miraculeux a eu lieu. C’est dans le ressassement de cette « annonce » (le Christ ressuscité) que le croyant trouve la « preuve » du miracle qui fonderait sa conversion. Et si l’événement n’a pas eu lieu, qu’il aura lieu (le retour de l’imam caché, le jugement dernier, etc.). Il y a quelque chose comme un nominalisme absolu dans cette façon de procéder. Badiou fonctionne ainsi. Le titre de son dernier opuscule « De quoi Sarkozy est-il le nom ? » trahit un nominalisme de chamane universitaire (la référence fétiche à Lacan, chamane en complet veston, emblématique des années 1960 et 1970, appuie très logiquement cette pose), et ce n’est pas une simple question d’exposé ni de forme : il recycle bel et bien d’antiques procédés propres aux religions révélées.
Une bassesse de tchékiste
Mais il faut d’abord dégonfler le personnage, que l’on nous présente sous les oripeaux de l’intellectuel engagé, universitaire appliqué à cultiver la philosophie, l’art, et la psychanalyse. Badiou se caractérise avant tout par une bêtise et une bassesse de tchékiste. Tout le reste du discours n’est qu’un habillage destiné à faire passer des positions aussi brutales que possibles, même si elles n’ont plus les moyens de leurs ambitions d’autrefois. Un exemple suffit : pour ironiser sur la posture « machiste » de Sarkozy, il écrit : « je mettrai ici quelque espoir dans l’étrange épouse du candidat », l a i s s a n t entendre qu’elle pourrait bien faire quelque révélation « génétique » sur le manque de virilité supposée de son mari. Ce saut de registre entre « l’analyse » et l’esprit des arrière-salle de café les plus enfumées résume au mieux la manière de fonctionner de cet idéologue. Les fusilleurs ne sont jamais loin avec ce genre d’arsenal.
Instrumentaliser le rejet de la mascarade électorale
La série de comptes-rendus de séminaires qui composent l’opuscule se présente comme un argumentaire destiné à conforter le rejet viscéral de Sarkozy et de ce qu’il représente. Position notable, Badiou ne défend pas un candidat contre un autre, et se met d’emblée hors du champ des mensonges électoraux. Mais l’opération est d’autant plus pernicieuse qu’il met ces dispositions à profit pour faire passer en contrebande une version à peine maquillée du stalinisme « transcendantal » (au sens où il utilise ce terme, voir ci-dessous, p. 23). Il ne voit pas que les gens votent depuis des décennies non pas « pour » un candidat ou un programme, mais essentiellement « contre », et que le vote décisif « pour » Sarkozy a été un vote de rejet des violences de 2005. L’oligarchisation du monde a échappé à Badiou, qui comme tout marxiste ne voit que les méfaits « capitalistes » et jamais les situations les plus despotiques. Comme tout stalino-gauchiste qui se respecte, il reproche bel et bien à cette société d’être « démocratique ». Il prend soin de se démarquer des « deleuziens » qui tentent d’actualiser leur vision du monde et voient dans les formes contemporaines une « société de contrôle » d’un type nouveau. Badiou assure que le contrôle se changera en terrorisme d’État pur et simple à la première bourrasque historique un peu sérieuse. Il se sert des éléments qui lui conviennent (enlèvements de quelques centaines de djihadistes ou supposés tels de par le monde, tortures, etc.) pour suggérer une fois de plus que nous sommes dans un régime de « dictature de la bourgeoisie », état d’exception foncièrement analogue à un « fascisme », bien sûr.
L’élément qui fonde sa posture
Mais la particularité de Badiou est plus fondamentalement de se présenter comme quelqu’un qui ne voit pas le « progrès partout ». Il a pris conscience à sa manière de l’immense reflux en cours et de la catastrophe historique qui est déjà advenue. Cette rupture évoque le versant trontien de l’opéraïsme italien : dans « La politique au crépuscule », sans rien renier de ses références stalinoïdes passées, Mario Tronti montre qu’il a pris la mesure de l’effondrement qualitatif du mouvement ouvrier. A ce carrefour, Tronti a pris une voie totalement différente de celle de Negri, qui recycle le vieux prophétisme marxiste, en se cherchant un sujet de substitution, « la multitude ».
De ce fait, Badiou dégage, par contraste avec le fond lénifiant de toutes les autres théories héritées, une apparence de vie. En rompant avec un élément fondateur de la métaphysique militante (le progrès en cours, illimité, irrésistible), il affecte d’affronter la dimension la plus déconcertante de l’histoire politique contemporaine. C’est à cette rupture de façade que Badiou doit la petite aura qui l’entoure désormais. Cet effort n’est évidemment pas mené au terme de sa logique, parce qu’il devrait réexaminer tout son passé, et tous les fétiches qu’il a cautionnés et qu’il cautionne encore (les régimes « soviétiques » de la Russie et de la Chine, les partis « communistes » des années 1950, etc.). Les diverses citations de Mao dont il ne peut s’empêcher encore de parsemer ses textes, la nostalgie attendrie qu’il manifeste pour la « révolution culturelle », etc., trahissent cet attachement à une matrice idéologique inchangée. Badiou est un nostalgique du goulag, et il lui faut seulement faire passer cet attachement de façon tacite, à la manière dont certains nostalgiques du IIIe Reich tentent de faire passer leur adhésion à la répression nazie par un épais silence sur les crimes les plus insupportables de leur modèle.
Mensonge par omission et haine de l’Occident
Badiou est quelqu’un qui ment par omission avec une détermination rare. La plus grande faille dans ses exposés tient à ce qu’il tait. L’excuse qu’il fournit à Staline, un « amateur d’un autre âge » (p. 37), lui permet d’annoncer que le vrai « totalitarisme » serait devant nous. Plus que toute autre variété de marxiste, Badiou refuse de voir ce qui caractérise les régimes totalitaires, qualificatif qu’on ne saurait appliquer aux régimes politiques et sociaux de l’Occident actuel. Badiou doit à sa position de (petit ?) mandarin universitaire, visiblement replié dans une douillette retraite, les loisirs qui lui permettent une reformulation sophistiquée des topiques stalinoïdes :la société existante n’est qu’une dictature déguisée, un fascisme à peine potentiel, presque toujours sur le point de s’actualiser le régime de Sarkozy est un pétainisme « analogique », piteux, passif, honteux il faut développer une nouvelle Résistance face à ce fascisme implicite (d’où les développements crypto militaristes sur la nécessité de « tenir un point »).
- le sel de la terre, ce sont les « humiliés et les offensés », les ouvriers d’origine étrangère. Ils viennent pour sauver l’Occident de lui-même il faut détruire ce qui se présente comme le « vrai monde », celui de l’Occident, où seules les marchandises et les capitaux peuvent librement circuler, pour unifier le monde où les êtres humains circuleront sans retenue. Tout ce qui s’oppose à l’Occident mérite donc d’être défendu, surtout si cette opposition est violente.
Cette haine de l’Occident est bien entendu cohérente avec la haine de la démocratie sous toutes ses formes, puisque c’est l’Occident et lui seul qui a inventé le projet démocratique. Le seul mode d’extension du monde « occidental » serait la guerre (Badiou restreint son regard aux situations de conflits : Palestine, Irak, Afghanistan, Somalie). Ce monde occidental révulse tant Badiou qu’il ne parvient pas à en nommer les caractéristiques actuelles. Il lui faudrait constater qu’il se définit aujourd’hui par le développement de la société de consommation, et non par la « démocratie » (dont il ne reste que des vestiges de plus en plus pitoyables). Et que ce dispositif social est bel et bien en train de se diffuser pacifiquement, depuis 20 à 30 ans, vers la Chine et l’Inde. Le biais de sa vision apparaît là dans toute sa splendeur idéologique (« »Occident« , ce mot maudit », p. 81).
La cohérence de Badiou
La cohérence de Badiou est indéniable. Il défend, en toute démagogie, le refus de s’intégrer pour « l’ouvrier marocain », qui aurait raison, puisque ce serait devenir comme le « petit-bourgeois européen ». De fait, tout Européen est aux yeux de ce stalinoïde un « petit-bourgeois », gibier potentiel pour le goulag transcendantal qu’il appelle de ses voeux implicites (il faut se souvenir de la phrase de Sartre approuvant par avance toute liquidation physique d’un blanc). C’est le genre de glissement qui aide à prendre la mesure de la façon dont les stalino-gauchistes intériorisent la haine des sociétés où ils sont nés et où ils se sont paradoxalement dé-formés. Tous les défauts et tous les crimes de ces sociétés sont impardonnables et irréparables, alors que ceux des autres sont à la fois « intéressants » et excusables, quand on ne les efface pas, plus simplement, des mémoires.
Ses objectifs para-religieux
Le chapitre IV expose avec une certaine clarté les objectifs para-religieux de Badiou : l’Occident est le monde du capitalisme déchaîné (thèse que le processus d’oligarchisation du monde invalide radicalement : les mécanismes « capitalistes » sont en réalité débordés par les logiques de pillage, de parasitage et de prédation), et les « démocraties » riches sont un faux monde (voué à la destruction, par conséquent).
- Il faut créer un seul vrai monde, c’est un impératif politique (belle illustration d’une incantation sacerdotale).
- Il faut refuser toute forme d’intégration, « persécutoire » par nature (pour Badiou et ses semblables, la question anthropologique ne se pose pas, les matrices culturelles collectives doivent être indéfiniment et instantanément malléables... quand il s’agit des Occidentaux et des Occidentales).
- les étrangers nous sauveront de la consommation nihiliste (la fascination fascistoïde pour une jeunesse perçue comme exotique, car c’est de cela qu’il s’agit au fond, est ici éloquente). Sa haine de l’individu vient de loin Le chapitre V poursuit dans la même veine, en expliquant à quel point l’individu est une « pauvre chose », ce serait l’expression de « l’animal humain ». Quand il en arrive à avouer : « Nous voulons savoir comment être les gardiens de l’avenir des vérités », la formulation para-religieuse devient plus manifeste encore . Tant que les stalinoïdes demeurent éloignés du pouvoir, ils s’efforcent de contrôler l’avenir. Et, comme l’a montré l’histoire du XXème siècle, dès qu’ils accaparent le pouvoir, ils étendent leurs ambitions au contrôle du passé. Tous ces développements moralisateurs (p. 99) ne sont que des opérations de manipulation assez transparentes : Badiou s’efforce de formuler des paralogismes permettant un jour de transformer les individus en chair à guerre civile et en instruments de nouveaux appareils de pouvoir. Pour Badiou, l’élection de Sarkozy constituerait en soi un « coup de nature globale », même si la « désorientation » publique aurait peut-être commencé avec l’élection de Mitterrand, « au moins ». Mais cette vision qui se présente comme un difficile et douloureux effort de lucidité est évidemment simpliste : la « désorientation » remonte beaucoup plus haut, au moins à la nature de l’URSS et au désastre amorcé en 1917. On peut suivre les intentions de Badiou à tout ce qu’il ménage dans le naufrage du mouvement ouvrier, et à ses redites du catéchisme de l’agit-prop stalinienne.
Le « transcendantal » et la désorientation
Le chapitre VI nous fournit la définition du « transcendantal » selon Badiou : ce serait « quelque chose qui, sans apparaître à la surface, configure de loin, donne la loi et son ordre, à une disposition collective ». La France serait ainsi habitée par le « transcendantal » pétainiste, depuis 1815 au moins. On voit se dessiner dans ce développement à quel point Badiou fonde sa dénonciation sur l’hypothèse d’une cohérence diabolique de Sarkozy. Comme tant d’anti- sarkozystes, mais avec des leviers idéologiques beaucoup plus pesants, Badiou avalise le rideau de fumée dont ce personnage de carton-pâte s’est entouré. Les ridicules vaticinations de Sarkozy sur 1968 s’inscrivent pour Badiou dans cette « cohérence » : comme si les évènements désignés par ce label venaient de se prod u i re (Pétain succède pourtant immédiatement à la défaite militaire et non 40 ans plus tard ) . De fait, Sarkozy, comme Balladur en 1993-1995, use et abuse de la rhétorique du « redressement » qu’affectionnent les droit e s f r an ç a i s e s .Même s’il ne faut jamais sous-estimer le pouvoir de la répétition dont l’industrie médiatique s’est faite une spécialité, attribuer une quelconque vie à cette logorrhée est ridicule. Badiou doit s’inventer un épouvantail pour faire passer le reste. La « désorientation » que dénonce Badiou doit infiniment plus à l’histoire du soviétisme, à l’écrasement des conseils ouvriers de Budapest, à la répression de toutes les formes de révoltes ouvrières dans les régimes de l’Est, jusqu’en Chine. Qui donc rappelle qu’en 1989 les membres des comités de grève ouvriers chinois ont été exterminés dans la phase de normalisation qui a suivi ? Là-bas, il n’y aura pas de Walesa, pas de Valentinovitch, car ceux qui auraient pu tenir ce rôle historique ont été préventivement liquidés, conformément aux moeurs du despotisme oriental dont le stalinisme fut le premier avatar sur une base industrielle. C’est dire que la « désorientation » vient de si loin que Badiou ne peut en nommer la source. Sa démarche vise à maquiller et à escamoter ce manquement crucial. Le mouvement ouvrier, détruit, ne peut plus offrir de perspective crédible aux migrants, qui passent d’emblée à l’objectif que les ouvriers ont fait leur après l’effondrement de leur histoire : s’intégrer au plus vite à la société de consommation. Et ceux qui affectent de les défendre inconditionnellement se retrouvent dans la situation que décrivait en 1940 Louis Mercier Véga à propos de ses camarades anarchistes chiliens : la défense et l’aide apportée aux immigrants permet à ceux-ci de s’intégrer plus rapidement, nullement de trouver une base solide pour un mouvement visant à la création d’un nouveau monde social. Ce type d’activité peut être tout à fait honorable, mais pourquoi se raconter tant d’histoires et la justifier de façon aussi peu rationnelle ?
Le « courage » selon Badiou
Dans le chapitre VII, le courage que prône Badiou se réduirait à « ne pas être pétainiste », péchant ainsi par une formulation étonnamment indigente : le refus d’intérioriser les références de la société de consommation constitue la véritable démarcation. Qu’elle soit à peu près incompréhensible aux migrants échappe nécessairement à Badiou et ses semblables. Il dévoile un peu plus ses présupposés en considérant que la « corruption » (entendue à divers sens) est la véritable essence de la « démocratie », mais il affirme, étrangement, qu’il faut conserver l’expression « démocratie véritable ». La note explicative qu’il fournit donne la clé de ce conservatisme terminologique qui va à rebours de tous les développements de l’opuscule : le maintien du mot « démocratie », du bout des lèvres, lui permet de justifier la conservation de sa référence majeure, le communisme ! Sans doute lui faut-il suggérer à ses suiveurs l’utilité de l’hyprocrisie terminologique.
Batteries idéologiques
C’est dans le chapitre VIII que Badiou dévoile tout à fait ses batteries idéologiques : la reprise de la formulation sartrienne (!) sur « l’hypothèse communiste » relève naturellement d’une technique d’euphémisme éprouvée. Mais il ne reproduit pas seulement cette logique, il la développe jusqu’à un point qui mérite l’attention. Il explique que cette « hypothèse » est la bonne parce qu’il n’y en a pas d’autres (pour les esprits religieux, il faudrait croire en un dieu, parce que sinon, le monde perdrait tout sens). Il rappelle d’ailleurs que pour S a r t re, si « l’hypothèse communiste » était invalide, alors l’humanité ne serait pas différente des colonies de termites ou de fourmis ! Ce genre de paralogisme conduit à une grande indifférence devant les massacres de masse. Tout l’impensé et le primitivisme du sartrisme s’est trahi là avec une éloquence dont la franchise surprend encore aujourd’hui...
Les séquences du « communisme »
Badiou réaffirme le conte de fée marxiste sur la nécessité de développer une dictature transitoire qui mène à l’extinction rapide de l’État, soit le contraire de toutes les expérimentations sinistres qui se sont répandues sur plus d’un tiers de la planète au cours du XXème siècle. Il explique en toute candeur que ce sera différent quand nous serons dans une période d’un genre nouveau. Le chapitre IX est consacré tout entier à cette dissertation sur les « séquences de l’hypothèse communiste ».
La pre m i è re séquence aurait duré de 1792 à 1871 (Badiou escamote la question du socialisme comme théorie ouvrière, qui se développe indépendamment de la théorisation communiste, d’origine agraire, de Babeuf).
La première tentative de réalisation du communisme aurait eu lieu de 1917 à 1976, en donnant vie à une forme inédite d’État autoritaire, « qui a obtenu certains résultats ». Ce serait la deuxième séquence. La période intermédiaire entre ces deux séquences n’aurait été qu’une période intervallaire de triomphe de « l’impérialisme » et de gestation pour l’avenir. Cette périodisation lui permet d’admettre que nous sommes dans une période de vide nouveau, et qu’il va falloir être terriblement patient. On re t rouve là cette posture qui donne un semblant de vie à ses vaticinations par ailleurs difficilement supportables. M a i s ce découpage temporel est évidemment bâti sur m e s u re pour mettre ses références idéologiques à l’abri des vérités les plus embarrassantes pour sa tradition politique. La période qui va approximativement de 1871 à 1914 fut l’occasion d’une croissance et d’un déploiement exceptionnels du mouvement ouvrier dans toute l’Europe occidentale et même orientale, ce que Badiou efface en bon redresseur d’histoire tchékiste. Elle ne fut pas « intervallaire ». Et la période qui commence en 1917 s’est de fait close vers 1956, avec l’écrasement « soviétique » des conseils ouvriers de Budapest (voir le texte « Dimensions anthropologiques de la société de consommation », pp 5-8 de ce numéro du Crépuscule).
Nous sommes entrés, depuis, dans une période de régression qualitativement bien plus grave que ne l’imagine Badiou. Il faut envisager l’hypothèse de l’ouverture d’un interrègne des mouvements sociaux analogue à celui qui a duré de 1660 à 1785 environ, en Europe occidentale. La complexité des nouveaux problèmes, l’épuisement de la dynamique industrielle, qui détruit la nature de façon immédiatement visible, que ce soient par des mécanismes marchands ou non, la disparition en tant que sujets collectifs d’acteurs comme la bourgeoisie et la classe ouvrière au profit d’un émiettement et d’une instabilité de tous les regroupements sociaux (ce qu’exprime le terme d’oligarchisation du monde) signent ce basculement.
Fidèle à la voie sartrienne du compagnonnage avec l’innommable, Badiou va jusqu’au bout d’une réaffirmation de la foi « communiste » (p. 152) : « l’hypothèse communiste nomme la seule chose qui vaille qu’on s’intéresse à la politique et à l’histoire ». Dans cette répétition mécanique, la cristallisation idéologico-religieuse est intacte.
Le paradoxe de la dénonciation de Sarkozy par Badiou.
Sans doute doit-on à la nature crépusculaire de l’époque cette curiosité : la dénonciation la plus véhémente d’un suppôt de l’oligarchie tel que Sarkozy émane d’un nostalgique impénitent du goulag. D’un tel porte-à-faux, la dénonciation sort affaiblie et biaisée au-delà de toute mesure.
Ce paradoxe reflète l’étrange effondrement de la créativité historique contemporaine, où la capacité de critique incisive a presque totalement disparu. Seuls des ersatz de critique occupent le devant de la scène publique.
Paris, le 15 mars 2008
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