Le rap est aujourd’hui une culture « jeune » qui irrigue toute la société, bien au-delà de la seule « jeunesse de banlieue ». C’est pourtant une musique très largement pénétrée par les valeurs de l’islam et, semble-t-il, de plus en plus à mesure que ce dernier se constitue en contre-culture unique et hégémonique dans ce que certains ont nommé « les Territoires perdus de la République ».
Tous les rappeurs ne sont pas pro-Islam, mais au nom de la tolérance et de l’antiracisme, on accepte davantage qu’ailleurs les dérives intégristes dans le milieu hip-hop et on ne se hasarde guère à attaquer la croyance. Les débuts prometteurs de la scène alternative dans les années 80 sonnaient comme un renouveau de la scène punk. Mais rapidement on est passé de la voie des minorités revendicatives à celle de la norme banlieusarde victimaire et conquérante. Le subversif se retourne ; aujourd’hui rapper avec des islamistes comme Médine est vu comme un acte engagé et critiquer l’islam est vu comme un acte de trahison.
Ce texte souhaite donner quelques repères sur cette évolution à travers la présentation de quelques-unes des figures principales de ce mouvement et des idéologies véhiculées par leurs textes et prises de positions publiques.
1 – Made In USA : la naissance du rap islamiste
Nation Of Islam
En 1930, Wallace Fard Muhammad crée à Détroit la ’Nation Of Islam’, une nouvelle secte d’inspiration islamique qui rencontrera un certain succès chez les noirs américains. C’est une tentative de retrouver sa religion d’origine à travers une recherche spirituelle et culturelle : « L’homme originel serait noir et un jeune scientifique prénommé “Yacub” aurait créé le diable, l’homme blanc, il y a 6.000 ans. Fard présente son islam en tant que solution au règne de la suprématie blanche et promet de délivrer les noirs Américains. [...] Les fidèles sont invités à abandonner leurs noms d’esclaves pour des « noms vertueux » (righteous names) » [1]. Un de ses leaders les plus charismatiques fut Malcolm X, qui la quittera en 1964 et sera assassiné moins d’un an après. Louis Farrakhan en a repris la suite jusqu’à l’heure actuelle. Il est vu par beaucoup comme un ’Hitler noir’ car on lui reproche une vision complotiste et antisémite ; les juifs seraient, entre autre, responsables de la traite des Noirs.
« Les 5% »
Un ancien étudiant de Malcolm X, Clarence 13X, quittera en 1963 la Nation Of Islam, pour créer la secte des « 5% » (Five-Percent Nation). Elle considère le monde divisé en 85% de pauvres ignorants qui ne connaissent pas le vrai Dieu, 10% possédant la vérité mais exploitant la majorité et les 5% restants sont “Les pauvres enseignants vertueux” (Poor Righteous Teachers) qui reconnaissent l’homme noir en tant que Dieu et enseignent « la paix, la justice et l’égalité à tous les hommes ». Pour ces adeptes de numérologie mystique, « 1 signifie le savoir, 2 la sagesse et 3 la compréhension. [...] Le chiffre 7 est tout aussi important parce qu’il représente la divinité, God. Les mathématiques et l’alphabet sont, en théorie, des codes que seuls les initiés Five Percenters comprennent. [...] Sa secte présentée comme un « mode de vie » plus qu’une « organisation religieuse » s’insère lentement dans la vie des adolescents des rues de New York, faisant des Five Percenters une partie intégrante du paysage de Harlem (rebaptisée The Mecca) et Brooklyn (Medina) [2]. » Le côté ésotérique inspira par la suite de nombreux rappeurs [3].
Des rappeurs labellisés Muslim [musulman]
Le hip-hop est né en 1973 dans les quartiers pauvres de New-York. Le rap n’est alors qu’une des disciplines du Hip-hop qui en connaît plusieurs : le rap, le DJing, le break dancing, le graffiti et le beatboxing. C’est d’ailleurs la danse qui est centrale, dans le hip-hop des débuts. Le hip-hop est alors associé à des fêtes : les Block Parties. On y retrouve l’ambiance multiculturelle propre au New-York de l’époque. La première vague du hip-hop (1973-1981) est donc en opposition avec l’ancienne génération des parents issus du Black Power [4] en affichant une apparence apolitique et un multiculturalisme débridé (et quasiment colorblind). Mais en 1984, la nouvelle école (new school) revendique un message déjà plus contestataire : parmi les rappeurs new-yorkais les plus influents de l’époque – Poor Righteous Teachers, Brand Nubian, Eric B and Rakim – beaucoup se réclament de la Nation Of Islam ou des « 5% ».
En 1986, un groupe révolutionne à la fois la musique et l’image du rap en lui donnant une image pro-black et révolutionnaire : Public Enemy [ennemi public]. Le groupe utilise chacun de ses clip pour dénoncer le « racisme d’État » et la violence de la police. Il n’hésite pas à placer des citations de Malcolm X ou de L. Farrakhan en début de chanson. En 1989, Public Enemy se sépare d’un de leurs membres, le Professeur Griff, suite à ses positions antisémites [5]. Le groupe restera en tête des ventes et des influences jusqu’en 1994.
2 – En France 1980-1995 : du rap contestataire au rap ethno-religieux
Le hip-hop français apparaît vers 1980. Curieusement, il apparaît très tôt à la télévision avec une émission sur la chaîne privée TF1 en 1984 : « H. I. P. H. O. P. », présentée par Sidney qui est ainsi le premier animateur noir sur le petit écran français. On considère alors le hip-hop comme une danse pour les « jeunes » que les médias vont d’ailleurs abusivement appeler “smurf”. L’engouement de la jeunesse suit. Néanmoins, rapidement, la mode s’éteint comme un feu de paille.
Mais les rappeurs, danseurs et graffeurs reprennent le mouvement de manière underground et auto-organisée. En 1988, Lionel D. anime une émission hebdomadaire sur Radio Nova, qui est alors l’un des rares médias à faire entendre des rappeurs. Il y fait rapper en direct de (très) jeunes talents. C’est encore un hip-hop bon enfant (le slogan est alors “Paix, Amour, Unité”). Dans son premier et seul album on sent la volonté pacificatrice d’un animateur de quartier que l’on retrouve aussi sur son deuxième single ’Pour toi mon frère le Beur’ :
"je voudrais tant voir le contraire pour toimon frère le beur au fond de toi la véritéparle avec ton âme des pages du Coran,d’une religion qu’on appelle Islam" [6].
C’est la tolérance qui est alors en jeu. Comme plus tard en 1995 avec le groupe Assassin :
"On ne me ment plus, l’africain est mon frèreLe musulman, le juif, je respecte leurs prières"
Yazid (proche des Suprême NTM), dénonce un racisme déguisé :
"Mais ma religion est mise en cause voilà le drameLe pays de la laïcité ne tolère pas (l’islam)" [7]
Akhenaton : le fils de rouge devenu soufi
En 1989, IAM fait apparaître le rap à Marseille. À l’époque, il est quasiment le seul groupe de rap connu en France avec Les Suprême NTM. L’acronyme IAM signifie à la fois “Je suis” (I am) en hommage aux luttes pour les droits civiques aux États-Unis, où des manifestants noires défilaient avec des pancartes « I am a man » ; mais aussi « Imperial Asiatic Men » (« l’homme impérial asiatique ») en référence aux civilisations d’Orient comme l’Égypte ancienne. Ainsi les quatre membres du groupe ont des pseudonymes de Pharaons célèbres : Kheops, Imhotep, Kephren et Akhenaton…
Akhenaton (Philippe Fragione), le leader du groupe, est un rappeur d’origine italienne. Son nom n’est pas pris au hasard puisque le pharaon Akhenaton serait le premier monothéiste de l’histoire, qui tenta d’imposer l’adoration d’un dieu solaire unique 1350 ans avant Jésus-Christ et pourrait avoir inspiré les hébreux. Contrairement à d’autres, Philippe Fragione a une véritable culture politique, tant au niveau local, l’histoire de Marseille (anti-centralisme) et au niveau géopolitique (tiers-mondisme). Il maîtrise l’anglais, fait de nombreux voyages à New-York et s’en inspire pour le style et les influences mystiques : il parlera d’abord de l’islam par la voie d’un ésotérisme américanisé. Il se convertit à l’islam en 1993.
La même année sort le 2e album d’IAM, ’Ombre est lumière’, succès monumental puisqu’il contient entre autres le tube ’Le Mia’, qui sera numéro 1 au Top 50 pendant huit, semaines en 1994. Dans cet album, Akhenaton fait son coming-out. Dans ’J’aurais pu croire’, après avoir fustigé Saddam Hussein, alors président d’Irak :
"Saddam, tu ne me feras pas croire à moiQue tu fais la prière en dehors des camérasSais-tu au moins qu’exhiber son portrait dans tous les coinsEst interdit par notre livre saint le Coran ?"
Shuriken reprend :
"Et tu blasphèmes blasphèmes et blasphèmesTe prends pour Saladin, oubliant par la mêmeQu’il était d’origine Kurde, abusant ton peupleManipulant les esprits à la guerre sainte appelle"
Puis la musique s’arrête :
"La guerre sainte se dit en Arabe :’al-jihad fi sabil Allah’, ’L’effort sur le chemin de Dieu’.Un document du Vatican précise’Le Jihad n’est aucunement le carême biblique,il ne tend pas à l’extermination mais à étendreà de nouvelles contrées les droits de Dieu et des hommes."
La suite chantée par Shuriken s’en prend à l’ayatollah Khomeiny (leader chiite de la “révolution” islamique en Iran depuis 1979), son sectarisme et son mépris envers les femmes. Puis Akhenaton expose son credo :
"Dieu n’a jamais rien dit de si indigneEt chaque livre saint se comprend entre les lignesMélanger politique et religion signifieDonner la victoire au matériel face à l’esprit"
Le morceau finit ainsi :
“Et ce n’est pas sans fierté que j’avoue avec émoiQue je pourrais croire en Dieu en toi en moiEt j’y crois” [8]
Dans un interview, Akhenaton dit s’être converti après des lectures d’écrits soufis ’plus ouverts que les interprétations rigoristes’. Interrogé sur sa famille communiste il répond : ’On a toujours cru en dieu dans ma famille, le communisme a débouché sur un anticléricalisme pas sur un athéisme (...) Peut-être que je suis devenu musulman car il m’ont transmis ce sentiment de trahison de l’époque mussolinienne où l’Église a fait corps avec les fascistes.’ [9] Il voit la France comme fermée aux autres cultures et constate ’que le modèle anglo-saxon (communautaire) fonctionne mieux que l’hypothétique valeur républicaine française jamais appliqué’ [10].
Tout au long de ces albums, solos ou avec IAM, il va faire des références, parfois quasi-subliminales, à l’Islam :
"Athée, j’ai mué, pour devenir un être ultra-mystiqueUn métèque de confession islamique"(Je combats avec mes démons, 1995)
"Pâle de peur devant mon père, ma sœur portait le voileJe revois, à l’école les gosses qui la croisent, se poilentC’est rien Léa, si on était moins scrupuleuxUn peu de jeu, du feu, on serait comme eux"(Née sous la même étoile, 1995).
"Et travers consignés au fond de ces quelques lignes, bleues.Nuit à Médine et air fantastique prêt à envahir les esprits comme Salah-ed-Din […]Une journée chez Iblis [le Diable] pété on s’croit fort, on hérisseOn pactise avec 6. 6. 6. et nos cœurs faiblissentJe pourrais pas revenir en arrière mais j’espère expier mes fautesProstré sur ma feuille et mes prières"(Une journée chez le diable, 2001)
Le Ministère AMER : les provos
En 1992, Stomy Bugzy et Passi vont, à travers leurs groupe, miser sur la provocation. Ils combinent révolution, gangstérisme et islam – un islam qui fait peur. En 1994, ils atteignent leur point culminant avec l’album ’95200’. [11]
Dans ’Pas venu en touriste’, Stomy parodie le film ’Devine qui vient dîner’ : un film américain de Stanley Kramer, sorti en 1967, sur une femme qui vient présenter son fiancé noir à sa famille blanche et raciste. En version intégration française selon Stomy ça donne :
"Ne faites pas la tête, non, accepte-moi belle mamanJe t’offrirai un exemplaire du CoranAccepte-moi beau papa tu auras la photo de l’AyatollahParlons de Monique je lui prévois un bel avenirTchador, je t’adore, elle le porteraQuoi ! Vous n’êtes pas d’accord ?"
Ils introduisent aussi le racisme (sur le mode provoc’ bien-sûr mais qui renvoie aux thèses américaines). Le morceau ’Les cloches du diable’ semble être tiré des thèses complotistes de L. Farrakhan :
"Certains s’enflamment, d’autres acclament profanentVendent leurs âmes, Marianne la Sheitane [le démon] blâme, baise et condamne […]Totalement dément Satan est-il ton président ?Pan ! Dans tes dents, je m’adresse à toi petit blanc […]L’ennemi ne peut rien même s’il chante ’aux armes citoyens’De plus en plus d’homos, de péchés, d’escrocsLes prêtres veulent la levrette, le mariage comme droitIls passent du ’’Hallelujah’’ au ’Bee bop a lulla’Tous les ans des dizaines de viols, de viols d’enfantsDe guerres, poussière tout redeviendra poussièreMais restera à jamais gravé le Ministère pour que la tête du porcDiable soit toujours reconnaissableUne couleur, un malheur, un coupable qui fait sonner les cloches du Diable"
Attaquant au passage les trop gentils Suprême NTM (eux qui avait rappé ’Farakhan ou Le Pen / Même combat pour la haine [12]’) en se référant à un de leurs textes (’Quelle chance d’habiter la France / Dommage que tant de gens fasse preuve d’incompétence.“), Stomy le fils de capverdiens chante :
"Dommage mon petit que ta mère ne t’ait rien dit sur ce putain de paysOù 24 heures par jour et 7 jours par semaineJ’ai envie de dégainer sur des f. a. c. e. s. d. e. c. r. a. i. e. [les Blancs]"
Finalement ce sont plutôt les tubes guimauves qui donneront des succès aux individualités du groupe (dont Doc Gyneco [13] !). Mais le rap « racailleux » n’en était qu’à ses débuts.
3 – 1995-2010 : la désinhibition du rap islamiste
Islamo-racaille
En 1994, Rohff sera à l’origine de Mafia K1 Fry (en verlan Mafia africaine) avec le groupe 113 et Kery James. C’est un rap, qui s’attache à raconter “réellement” la vie de quartier. L’islam n’est évoqué que comme un marqueur identitaire. On ne manque pas de respect aux musulmans ; les rappeurs Busta Flex, et MC Jean Gabin essuieront de violentes attaques pour avoir offensé la religion musulmane. Dans une compilation de 1997 : ’l’Invincible Armada’, Stor. K s’attaque à Busta Flex en ces termes :
"Prétends être un fils du viceFais gaffe l’ami, moi j’suis un fils du FIS [Front Islamique du Salut, à l’origine de la guerre civile en Algérie en 1989-1999]" [14].
Il n’est plus question d’un islam des parents, mais d’un islam politique qui fait aussi référence à la Palestine : ’Hardcore, sera la reconquête de la Palestine’ [15] (c’est la position du Hamas) ou fait appel à un certain ordre moral ; ainsi, Kery James pensera que c’est « Hardcore » ’deux pédés qui s’embrassent en plein Paris’ [16], et 113 penseront à “rétablir la peine de mort pour les travs’ [les travestis] et les pointeurs de gosse [les violeurs pédophiles].” [17]
Rohff (ex-Mafia K1 Fry) soulignera plus tard la tartufferie d’une tel posture :
"On a l’cul entre deux chaises électriques, ma gueuleLe vendredi au Jama’a [la Mosquée] et le soir en club […]Le travail sur soi, notre plus grand Jihad [lutte sacrée]Fais pas le barbu, si t’es corrompu mets-toi au Gilette" [18].
L’homophobie de Sexion d’Assaut
Faisons une parenthèse sur l’homophobie. Pour ce faire il nous faut présenter un groupe plus récent : Sexion d’Assaut [19], qui commence à se faire connaître en 2008. Constitué d’un groupe de jeunes pour la plupart originaires d’Afrique (Sénégal, Congo, Guinée), Sexion d’Assaut fait parler de lui grâce à des freestyles filmés dans la rue. L’un d’eux, “A 30%”, leur donnera un fort succès d’estime ; c’est un solo de Maître Gims, avec une pointe d’homophobie :
“Akhi [ami], ton cousin c’est pas le chimpanzé […]T’as froid dans le dos quand un travelo te dit vas-y viensCar tu sais que l’homme ne naît pas gay mais qu’il le devient […]Le temps c’est des hassanats [les bonnes actions coraniques] donc la famille accélère.” [20]
Le décor est planté : des punchlines multisyllabiques, des petites pincées de créationnisme, un peu d’islam et de l’homophobie. Plus tard la Sexion d’Assaut explose ses ventes avec l’album “L’École des points vitaux”(2010). La chanson Désolé est un tube record de vente de rap et le groupe attire désormais l’attention.
Une interview fait grincer des dents. Lefa y déclare : ’Pendant un temps, on a beaucoup attaqué les homosexuels parce qu’on est homophobes à 100% et qu’on l’assume. Mais on s’est dit qu’il était mieux de ne plus trop en parler parce que ça pouvait nous porter préjudice. [...] Il y a quand même des gays qui viennent nous voir ! On ne peut pas se permettre de dire ouvertement que, pour nous, le fait d’être homosexuel est une déviance intolérable.(...) C’est un phénomène de mode qui nous dépasse on ne comprend absolument pas que le mariage gay et que l’adoption par les gays soient acceptés dans certains pays ! Mais on est des gens très tolérants, on est croyants et même Dieu a envoyé un prophète chez des gays pour les rappeler à l’islam et pardonner leurs péchés.’ [21]
De vieux freestyles de 2006 sont mis en lumière :
“Ça m’a saoulé, j’crois qu’il est grand temps que les pédés périssentCoupe leur pénis, laisse les morts, retrouvés sur le périphérique” [22]
Le groupe rétropédale rapidement devant les campagnes de boycott. Un communiqué de presse est envoyé, qui plaide l’ignorance : “Je me suis rendu compte en vérifiant la signification du mot “homophobie” que j’avais sorti une connerie plus grosse que moi. C’est vrai que j’ai grandi dans l’ignorance de ce que ce terme signifie vraiment. Mais ni moi ni le groupe ne sommes homophobes [23].” Le groupe fait profil bas, organise désormais des débats contre l’homophobie [24] et se concentre sur sa musique, de plus en plus pop.
La chanson “Désolé”, qui avait pourtant fait la une des charts quelques années sans faire de vagues, fait polémique en 2016 à l’occasion d’une commémoration de la bataille de Verdun où est invité Black M, l’auteur de :
“Papa maman désolé(...)J’me sens coupableQuand j’vois c’que vous a fait c’pays d’koufar [de mécréants, d’infidèles].” [25]
Lunatic, le moine et la brute
Le groupe Lunatic se crée en 1996 . Il illustre un peu la contradiction d’un islam « religion de paix » mais qui doit faire peur… Il est constitué d’un duo comprenant un rappeur religieux faisant constamment référence à l’Islam, Ali, et un autre plus « racailleux » et violent, Booba. Le groupe obtient un disque d’or en indépendant avec son premier et seul album ’Mauvais œil’. Extrait :
Ali :
"Avertissement, écouteTa foi baisse à chaque fois qu’tu doutesEt sans elleT’es comme un ange sans ailes"
Booba :
« Nique la justice, y’a qu’Dieu qui peut me juger » [26].
Et encore Booba :
"Et en plus ils veulent qu’on dégageAprès ces fils de putes s’étonnent quand y’a des clous dans les bouteilles d’gaz [allusion à l’attentat islamiste du métro Saint-Michel en 1995]" [27]
Le groupe se scinde en 2003. Interviewé sur une possibilité de reformation en 2015, Ali résumera « Booba est mon frère mais le côté lunatique, schizo c’est fini » [28]. Depuis Ali est devenu un rappeur plus confidentiel et aussi plus religieux.
Booba devient numéro 1 du milieu du rap français. Il est aussi appelé par son vrai patronyme Elie Yaffa, car la rumeur voudrait que Booba soit juif… Il y répond à sa façon : “Je trouve dommage qu’ils disent que je suis juif comme si c’était une insulte. Les gens disent ça comme si c’était grave. C’est totalement raciste, c’est vraiment des grosses merdes ! Et si j’étais juif, t’inquiètes pas que j’aurais un gros bling-bling avec une étoile de David. Je leur dirais “allez vous faire enculer !” [29].Toujours en quête de buzz, Booba insulte régulièrement ses comparses via les réseaux sociaux, se créant autant d’aficionados que d’ennemis.
Son album “0.9”, en 2008, est lancé via un titre ‘Illégal’ où l’on entend entre autre : “J’me lave le pénis à l’eau bénite”. En 2014, Booba se brouille même avec Tariq Ramadan (!) qui lui reproche de ne pas prendre parti dans le conflit israélo-palestinien [30]. Car malgré ses précédentes allusions (“je suis d’humeur palestinienne” [31]) ce fils d’une mère belge et d’un père sénégalais ne s’intéresse pas au conflit : “je suis plus concerné par l’esclavage [32]”.
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